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B. Serin : « Metz est notre priorité ! »

Bernard Serin était l’invité de D!RECT FM lundi, juste avant Metz – Lens. Il a répondu sans détour aux questions de la radio et de ses auditeurs, n’hésitant pas à faire le point sur l’état actuel du projet de nouveau stade et sur l’avenir du club. Morceaux choisis.
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Bernard Serin, quelle analyse faites-vous depuis votre arrivée en tant qu’actionnaire du FC Metz ? (Franck, de Toulouse)

Bernard Serin : Bonjour à vous Franck, et bonjour à tous les supporters grenats qui, comme vous, habitent loin de Metz. J’en croise beaucoup à travers la France, et même à Marseille où il y a une colonie incroyable de Lorrains qui supportent le FC Metz ! Pour répondre à votre question, cela fait maintenant trois ans que je suis plus proche du FC Metz et du Président Molinari, même si j’ai été près du club pendant plus d’une vingtaine d’années. A l’époque du premier partenariat entre le FC Metz et Sollac en 1984, j’en étais en effet l’animateur, étant directeur de l’usine. Depuis trois ans maintenant, je me suis rapproché du FC Metz pour, dans un premier temps, aider le Président à structurer un projet dans un contexte qui a vu le football énormément changer.

C’est-à-dire ?

BS : C’est-à-dire que le FC Metz a manqué un virage déterminant en 1998. Après avoir terminé la saison vice-champion de France de D1, il s’est réveillé en septembre 1998 face à dix concurrents qui disposaient d’un stade Coupe du Monde alors que lui-même n’avait pas su prendre ce virage, parce que les collectivités territoriales à l’époque n’avaient pas souhaité le prendre. Il faut savoir en tirer les conséquences. Aujourd’hui, le budget d’un club est fonction de son potentiel et de l’outil de travail dont il dispose. Le potentiel, le FC Metz l’a. C’est son outil de travail qui est devenu obsolète. En 1986, nous étions les premiers en France à avoir des loges dans notre stade. En 2009, nos loges peuvent accueillir 312 personnes quand à Lens, ce sont 2 400 places qui sont à disposition des VIP. C’est dire le fossé qui s’est creusé entre Metz et ses rivaux du championnat de France.

Monsieur Serin, quels sont les « plus » et les « moins » du club selon vous ? (Franck)

BS : Le plus, c’est évidemment le fait qu’il existe un gros potentiel. Ici, nous avons un bassin de population et un bassin économique extraordinaires. Je le qualifie d’ailleurs de cinquième de France probablement derrière Paris, Lyon, Marseille et la région Nord-Pas-de-Calais. Le FC Metz draine toute la Moselle, mais historiquement également le nord de la Meurthe-et-Moselle. Et puis, il y a le Grand-duché du Luxembourg, qui n’a pas de championnat professionnel mais qui a des supporters et de grands amateurs de football ! N’oublions pas que les grands joueurs luxembourgeois ont tous joué à Metz. Au total, c’est donc 1,5 million de personnes qui ne demandent qu’à vibrer pour le FC Metz. Si nous arrivons à capter ce potentiel, si nous arrivons à avoir un budget qui nous permette d’avoir une masse salariale de joueurs suffisante, alors nous atteindrons un niveau cohérent avec les cinq à dix premières places du championnat de France de Ligue 1. Le projet du club est celui-là.

En cas de remontée en Ligue 1, que comptez-vous faire pour que le FC Metz y reste durablement ? Après le maintien, il faudrait passer à la vitesse supérieure ! (Claude)

BS : Tout à fait ! Tout le monde, et moi le premier, espère voir une montée en première division à la fin de la saison. Nous sommes bien partis mais il reste encore beaucoup de matches et nous avons beaucoup de concurrents. Quand nous serons en Ligue 1, nous devrons tirer les leçons de notre précédente montée qui ne s’est pas bien passée puisqu’elle s’est soldée par une relégation immédiate. Nous avons fait des erreurs, c’est vrai. Après avoir survolé le championnat de Ligue 2, nous nous sommes peut-être vus trop beaux, l’entraîneur de l’époque a peut-être également surestimé le potentiel de ses jeunes joueurs, et nous avons manqué d’un encadrement par des joueurs d’expérience. Avec, en plus, quelques blessures en début de saison. Nous devrons procéder autrement. Cette saison, nous avons déjà des joueurs cadre en nombre supérieur à celui de la saison passée, des joueurs qui peuvent nous aider à remonter et qui pourront aussi être des cadres de l’équipe la saison prochaine. Enfin, je ne vous le cache pas, il faudra renforcer cette équipe pour bien figurer en L1.

D!rect FM : Aujourd’hui, on sent une certaine frustration du public. Nous-mêmes, nous sommes un peu surpris que même face à Montpellier, qui est une belle équipe, et alors même que le FC Metz pratique du beau football, il y ait moins de 9 000 personnes au stade Saint-Symphorien.  Ne trouvez-vous pas que le public soit trop exigeant vis-à-vis du club ?

BS : Le public est exigeant, mais à juste titre. Il a eu l’habitude pendant plus de quarante ans de voir un spectacle de première division et il n’a pas trop envie de voir un spectacle de Ligue 2. Je  rends hommage à tous les supporters qui viennent. Mais, c’est vrai, à Saint-Symphorien l’affluence moyenne cette saison est inférieure à 10 000 spectateurs alors qu’à Lens, elle est de 27 000 ! Trois descentes en une décennie, c’est beaucoup, nous devons reconquérir notre public. Mais je suis sûr que nous le retrouverons, parce qu’il y a un amour pour ce club. Toute la région aime le FC Metz ! Même si le stade n’est pas bien garni, la première chose que fait la plupart des gens tous les samedis matin, est de connaître le résultat du club. Sans oublier que nous sommes dans une situation difficile puisque nous jouons le vendredi ou le lundi soir, les gens travaillent ces jours-là et il est parfois compliqué de venir au stade, surtout pour un club comme nous qui a une dimension régionale et dont les supporters viennent parfois de loin.

L’actualité en ce moment, c’est bien entendu le nouveau stade. Où en est le projet de construction de ce nouveau stade et où va-t-il se construire ? (Mickaël)

BS : Il y a un peu plus de deux ans, nous avions lancé l’idée de la rénovation du stade Saint-Symphorien, parce qu’à l’époque, dans le contexte de la municipalité, nous pensions que c’était le seul projet que l’on pouvait présenter. Ce projet englobait la reconfiguration du stade, le passage à 33 000 places et à 2 400 places VIP, et aussi l’ambition de le faire fonctionner en permanence toute l’année avec des séminaires ou des réunions, pour avoir une activité économique annexe au football. Même limitée, parce que le stade ne s’y prête pas trop, que les accès sont difficiles et les places de parking réduites. Nous avons présenté le projet à la municipalité de l’époque. Ensuite, il y a eu beaucoup de questions mais pas vraiment de décisions. Et puis, les élections sont arrivées et nous avons dû mettre ce projet de côté parce que ce n’est pas au moment où chacun présente des projets différents qu’il faut mettre sur le tapis une question que l’on veut consensuelle.
Nous avons ressorti ce sujet après les élections municipales, en septembre dernier. Dans l’intervalle, un nouveau modèle économique a vu le jour, qui a été expérimenté par plusieurs villes. Beaucoup, aujourd’hui, veulent des stades neufs. Alors, pourquoi des stades neufs ailleurs et simplement une rénovation à Saint-Symphorien à trente millions d’euros ? Nous avons donc, à notre tour, développé un modèle économique faisant appel à plusieurs partenariats :
-    un partenariat commercial : si l’on construit un stade neuf et qu’on le combine avec un centre commercial, les gens qui financent le centre commercial peuvent, ou doivent, financer une petite partie du stade ; estimons cette partie à un tiers.
-    ensuite, si l’on construit un stade neuf, il devient polyvalent pour accueillir une quarantaine ou une cinquantaine d’événements dans l’année, cela nécessite donc une société d’exploitation. Cette société, si on lui concède l’exploitation, peut aussi apporter une partie du financement nécessaire au stade.
-    et, enfin, un partenariat avec les collectivités territoriales. D’ailleurs, au final, on s’aperçoit que pour les pouvoirs publics, c’est équivalent de financer un stade neuf ou de financer la rénovation de Saint-Symphorien.

D!rect FM : Qu’en est-il du soutien de ces collectivités territoriales ?

BS : Nous avons donc présenté ce nouveau projet à la municipalité en place, à Philippe Leroy, président du Conseil Général de la Moselle, à Jean-Pierre Masseret ainsi qu’à la CA2M (Communauté d’Agglomération de Metz Métropole, ndlr). Tout le monde se dit intéressé, il faut désormais trouver un terrain suffisant, d’au moins trente hectares pour abriter le stade, les parkings et le centre commercial. Il faut que la municipalité ou les collectivités territoriales soient prêtes à apporter ce terrain au projet. Pour le reste, nous avons déjà l’opérateur commercial et nous savons quelles sont les sociétés d’exploitation qui pourraient être intéressées. Reste donc ce terrain à trouver.

D!rect FM : Justement, on dit que la municipalité de Metz ne serait pas très favorable au sport professionnel ? Qu’en pensez-vous ?

BS : Je ne pense pas, nous avons reçu un accueil très positif. Richard Lioger et Thierry Jean, les deux premiers adjoints, ont été désignés par le Maire pour être nos interlocuteurs sur ce sujet, parce que c’est un sujet sportif, certes, mais avant tout économique. On parle ici de 100 millions d’euros de budget, on parle d’implantation commerciale, on parle de connexion avec les infrastructures de transport. C’est très lourd.

D!rect FM : Quels sont les emplacements possibles pour ce nouveau stade ?

BS : Par rapport à toutes ces conditions, trois sites sont actuellement à l’étude :
-    Frescaty : c’est le site qui offre le moins de possibilité parce qu’il se libérera certainement trop tard, surtout si nous voulons être candidat à l’accueil de l’Euro 2016,
-    Un site à proximité de la Foire Internationale de Metz, proche de la voie rapide,
-    Un troisième au nord du Pontiffroy, qui sera libéré bientôt par les militaires
Ces trois sites sont évoqués par la municipalité. J’avoue que plus nous serons dans la direction nord de Metz, mieux ce sera pour les supporters du club, qui viennent à 75 % du nord, des bassins sidérurgiques, du Pays Haut, du Luxembourg, du bassin houiller et de l’est mosellan.

D!rect FM : Au nord de Metz... Il y aurait un appel du pied de certains politiques d’une zone située autour d’Amnéville, de Talange, de Maizières-lès-Metz, qui seraient favorables à accueillir le stade et prêts à en financer une partie. Quelle est votre réponse à cela ?

BS : J’ai effectivement connaissance du fait que des collectivités locales de cette région se réunissent pour étudier cette question et peut-être nous faire une proposition. Pour l’instant, je n’ai pas été contacté mais je connais l’existence ce projet sur un site qui se trouve à côté du Parc Walygator, sur les friches industrielles qui cherchent une vocation. C’est un endroit acceptable, mais notre premier choix évidemment est Metz. Nous sommes le Football Club de Metz, nous portons les couleurs de la ville depuis 1932 et nous préfèrerions donc être sur un site de la ville de Metz ou de la CA2M. C’est une question littéralement « existentielle » pour le club, une question de vie ou, peut-être pas de mort, mais de vie dégradée ou de vie en Ligue 2 si nous n’avons pas un outil de travail performant. Il y a dix clubs qui ont eu un stade Coupe du Monde, il y a dix clubs qui auront un stade pour l’Euro 2016 ou équivalant (même si la France n’accueille pas l’Euro, il existe un projet de rénovation des stades dans le cadre des grands travaux de la République Française). Si nous ne faisons pas partie de ces clubs, alors je crois qu’il faudra tirer les conclusions qui s’imposent, à savoir qu’il n’y aura pas eu de volonté politique suffisante pour que le FC Metz ait sa place en tête du football français.

Que se passerait-il si le FC Metz ne remontait pas en Ligue 1 ? (Sébastien)

BS : Il faut parler vrai. Si le FC Metz ne remonte pas en Ligue 1, la saison prochaine sera plus difficile encore que celle en cours. Les droits TV diminueront encore – il faut savoir qu’il y existe une aide à la descente la première année suivant la relégation –, nous ne pourront vraisemblablement pas compter sur un public ni sur des sponsors plus nombreux. Mais il faut garder espoir. Nous avons une richesse importante, ici, au FC Metz, c’est notre centre de formation. C’est l’un des meilleurs d’Europe, classé huitième par l’UEFA et troisième par la Fédération Française de Football.  Beaucoup de nos jeunes évoluent dans les équipes nationales. Nous avons de très, très bons joueurs ; il faut simplement, dans le cas où nous serons encore en L2 en 2009/2010, prévoir de les encadrer par des joueurs d’expérience pour les accompagner sur le chemin de la maturité. C’est comme cela que nous arriverons à faire progresser nos jeunes et à remonter le club en Ligue 1. Parce que c’est là sa véritable place.

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