Retrouver la flamme

Il est maigre, le Graoully. En restant tapi dans l’ombre,
le pauvre animal ne risque pas de trouver de quoi subvenir à sa faim.
De points, il n’en a guère récolté en six journées.
Et le voilà pris de maux d’estomac alors que l’hiver approche.
Le soleil brillant de moins en moins, il n’a trouvé pour s’éclairer
qu’une triste lanterne rouge qui traînait dans un recoin poussiéreux
de sa demeure. S’il était compréhensible, au départ,
que le volatile soit hésitant, il est désormais vital qu’il
prenne son envol pour partir à la chasse aux points. Qu’il en ramène
trois, un ou zéro ce samedi, il aura au moins essayé. «
Une fois que le coup de sifflet final aura retenti, explique Joël
Muller, aucun de nous ne doit pouvoir se dire qu’il n’a
pas tout donné. » Ce serait un comble pour un dragon que
de se laisser mourir à petit feu…

Pour la première de ses trois sorties en huit jours, le prédateur
compte deux avantages. D’une part, il n’aura pas à se déplacer
bien loin. Et d’autre part, le duel qui lui est proposé paraît
propice à réveiller ses instincts. Le calendrier l’envoie
en effet au pays du chardon où il est attendu avec impatience. La population
aime tellement ces joutes de voisinage qu’il lui semble ne pas y avoir
goûté depuis des lustres. Du coup, même si les chiffres dénotent
une certaine faiblesse des forces en présence, l’arène de
Nancy fera le plein de fidèles des deux camps. On peut logiquement s’attendre
à ce que le combat ait lieu dans une ambiance électrique. «
Il n’est pas possible de rester complètement insensible à
l’aspect ‘derby’, estime Joël Muller. Toute
la semaine, nous l’avons ressenti à travers les médias ou
les supporters. Ce match a un impact important auprès d’eux. »

Que les fans messins se souviennent : alors que les deux formations tentaient
de s’extirper des méandres du premier sous sol de l’élite,
une victoire en Meurthe et Moselle avait lancé leurs favoris vers les
sommets. Cette fois encore, un succès donnerait de l’air au vainqueur
tandis qu’il embourberait le vaincu dans un sale pétrin. Malheureusement,
les Grenats n’ont pas en leur possession l’ensemble de leurs armes
pour tenter de rafler la mise. Obraniak suspendu et indisponible ; Ahn, Ouadah
(absent toute la semaine des entraînements, le milieu de terrain ne fera
le voyage que pour s’asseoir dans les tribunes), Paisley et Allegro blessés
: cinq titulaires du douloureux Metz-Lille sont hors concours. La moitié
des joueurs de champ…

Le onze messin, quel qu’il soit, se découvrira au fil des minutes.
Son entraîneur espère qu’il y naîtra « la flamme
» attendue depuis la reprise de la compétition. Il a sélectionné
un groupe de dix sept hommes. Un de trop, pour palier à un éventuel
désistement de dernière minute. « J’attend
d’eux qu’ils jouent sans crainte ni appréhension, qu’ils
nous donnent la flamme qui nous manque actuellement. » Ce matin,
il tombait sur Metz un fin crachin qui semblait tout droit venu des Highlands,
terres du « fighting-spirit » où se côtoient fantômes,
lacs, donjons et dragons. Puisse t-il réveiller ce Graoully qui sommeille
dans d’obscurs tréfonds.