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Me Reiss : il faut un plan de réforme

Suite et fin de l'interview de Maître Reiss, l'avocat du FC Metz. Partant du constat que le système judiciaire actuel dans le football français est "trop complexe", l'avocat messin a proposé un "plan de réforme", "simplifié" au Président de la Fédération Française de Football.
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Comment se fait-il que les décisions prises par les différentes
commissions se montrent parfois si contradictoires ?


Maître Reiss : " Pour l'instant, Rennes en est
encore au stade de l'appel et va soumettre son recours devant la commission
fédérale d'appel. Dans l'histoire, Toulouse a donc un temps d'avance sur Rennes.


Jusqu'à cette commission et jusqu'au CNOSF au-dessus, les décisions sont assez
sèches et ont a vu qu'il pouvait y avoir des retournements de situation au dernier
niveau de la structure judiciaire. Toulouse et Rennes ont tous les deux perdus
en première instance, en deuxième instance et devant la commission fédérale
d'appel. Ensuite est intervenue la modification au niveau de la juridiction
de la fédération.

Pour le dossier Strasbourg-Metz, on a aussi pu relever une contradiction. Les
"pontes" du Conseil Fédéral ont décidé, après avoir demandé l'avis du CNOSF
et au mépris de ce qui s'est passé devant la commission fédérale d'appel, que
Strasbourg devait récupérer les trois points perdus. Ces contradictions ne sont
de toute façon pas très saines. "



Que pensez-vous de ces situations souvent confuses et que préconisez-vous
pour les clarifier ?


Maître Reiss : " Ce n'est donc pas très bien qu'au
sein d'un même organisme il y ait des avis contraires. Si le conseil fédéral
sanctionne la commission fédérale d'appel, il faudrait tout simplement supprimer
cette dernière qui n'aurait alors plus lieu d'être.

Dans le système actuel, les données sont très compliquées. Si en cas de forts
désaccords un club voudrait se pourvoir devant la justice de droit commun, il
lui faudrait d'abord franchir les 5 échelons de la Ligue et de la fédération
pour ensuite accéder au tribunal, à la cour d'appel puis à celle de cassation.
En définitive, pas moins de 8 recours possibles s'offrent aux clubs et tout
ceci n'est pas très sain.

Ce n'est pas sain non plus car ces commissions ne sont pas non plus correctement
dirigées. La CAE est par exemple composée de 14 ou 16 membres. Or un tribunal
qui implique autant de monde ne correspond à rien. On ne rend pas la justice
de cette façon sinon, nos tribunaux auraient déjà adopté le système. Si un gage
de bonne justice était de réunir des commissions aussi imposantes, l'administration
judiciaire s'en serait déjà largement inspirée.

C'est pour toutes ces raisons qu'il y a peu, j'ai proposé au président de la
fédération un plan de réforme absolue de tout le système judiciaire du football.
Sur la forme, je serais d'accord pour conserver la première et la deuxième instance.
Le reste serait supprimé pour ne laisser qu'une unique commission fédérale d'appel,
jouant en quelque sorte le rôle de la cour de cassation. La formule éviterait
bien des contradictions.

Ensuite, si les gens n'étaient encore pas contents, ils pourraient toujours
saisir les juridictions. De cette façon, le schéma serait déjà pour moi bien
simplifié. "



Votre proposition a t-elle reçue immédiatement un avis favorable ?

Maître Reiss : " Ma proposition a reçu un avis
favorable au moins au niveau de la relecture et de la réécriture des textes.
D'ores et déjà, la Ligue a confié ce travail à des juristes. La réforme est
donc déjà bien engagée.

Il reste cependant un autre problème à traiter et pas des moindres : celui de
la réactualisation des textes. C'est bien gentil de prévoir des réglementations
particulières sur les licences, les passeports, etc.

Mais quand on sait que le football professionnel brasse des dizaines de milliards
de centimes, je me pose quand même la question de savoir s'il n'était pas bon
de créer à ce jour des textes sur les rapports avec des managers. Voilà quand
même des gens qui se trouvent au centre du gros business du football français,
qui parlent de gros sous à longueur de journée, qui ont des rapports constants
avec les clubs et les joueurs. Je dis qu'un jour, faute de réglementer ces rapports
joueur-manager, manager-club, on risque d'avoir de très gros problèmes. Comme
l'intermédiaire est une nouvelle forme généralisée de négociations dans les
contrats, je pense qu'il est aussi important de savoir légiférer en la matière.
C'est une forme nouvelle qui vient de s'installer dans le football moderne et
avec laquelle il va falloir compter.

Nous devons réussir à gérer toutes ses nouvelles situations. Maintenant au niveau
de la modification des structures juridiques, je crois que ce que j'ai envoyé
à la fédération peut être quand même un bon point de départ qui j'en suis sur
va entraîner une modification. Mais je répète que, en plus de réécrire les textes
qui régissent le football, il faudrait aussi absolument simplifier la composition
des commissions ainsi que le nombre de recours possibles. "



D'une manière plus générale et à l'image des supporters, une lassitude de
voir les affaires judiciaires se multiplier dans ce championnat se fait-elle
sentir au niveau des dirigeants de club ?


Maître Reiss : " Je ne pense pas pas que les dirigeants
de clubs soient las. Ils en jouent plutôt maintenant. Regardez, Rennes serait
bien content de prendre les trois points qui les relanceraient dans la course
à l'Europe. Toulouse serait également ravi de se servir des règles pour tenter
d'échapper à la relégation. Il est clair que les clubs en tant que tels ne s'en
lassent pas. Il existe bien une éthique sportive, ça doit se gagner essentiellement
sur le terrain, mais on édicte des règles. Elles doivent elles aussi être respectées.


Au sein des différentes commissions juridiques, je sens plutôt la volonté pour
chacune de tirer la couverture à elle en rejetant les responsabilités sur l'autre,
compte tenu de toutes les contradictions qu'il y a eu. En revanche, la lassitude
se situe essentiellement au niveau des directions de la Ligue et de la FFF.
Ils se lassent car ils constatent quelque part que les textes sont inadaptés.
Evidemment, ils sont bien ennuyés de constater leur propre carence. Là encore,
une refonte, une relecture et une réécriture des textes apparaissent indispensables.
"



Dans l'avenir, pensez-vous que le football va rester autant tributaire des
différentes échéances juridiques ?


Maître Reiss : " Le football n'échappe pas à la
règle de notre société. Il y a aujourd'hui une nécessité de plus en plus grande
de prendre conseil, d'être assisté. Ce sport est une activité économique comme
d'autres, pourquoi échapperait-elle à la règle qui veut que dans le droit des
affaires et dans le droit social, on soit entouré de ses conseils? Au contraire,
je crois que le football rattrape ce qui existe ailleurs. Nous sommes sortis
du régime associatif pour entrer dans le régime de société anonyme. Le football
se devait ainsi de rattraper le monde du commerce et de l'industrie, dont il
fait aujourd'hui incontestablement partie. "

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